Je me suis permis de produire un interview de Moussa Mara, ancien premier ministre du Mali et Président du parti Yéléma sur Breizh-info.com, à l’occasion de la sortie de son livre « Jeunesse africaine, le grand défi à relever ».

La sortie de ce livre a suscité d’autres entretiens dont celui du journal Le Point.

Je me permets d’en rappeler certains points forts qui relèvent à la fois du développement du pays et du nécessaire partenariat entre jeunes et société civile dans la réussite de cet objectif.

« La Diaspora a un rôle important à jouer … pour inviter la population à aller de l’avant vers une démarche de création de richesse et de prospérité locale. »

Longtemps des pays comme le Mali ont laissé faire cette migration devant les perspectives de return financier. Effectivement, les membres de la Diaspora contribuaient à renforcer des équipements locaux, mais dans beaucoup de cas les gains acquis par les migrants aidaient la famille, à préparer le retour, la retraite venue.

Laisser faire cette migration, c’est aussi négliger les énormes efforts d’intégration que les membres de la diaspora développaient pour s’intégrer dans leur nouvel écosystème.

On ignore souvent que rien que pour l’année 2010, 7,3 % des créations d’entreprises en France ont été le fait de migrants.

Que dire aussi des étudiants boursiers, qui se trouvent confrontés au dilemme de leur avenir professionnel.

« Il faut arrêter d’envoyer de l’argent aux jeunes frères pour leur dire de venir … Il faut essayer de l’investir localement dans l’agriculture, dans l’amélioration des techniques de production, dans l’élevage, dans le petit commerce, dans les prestations de service.

Cessez de pensez que ailleurs, c’est mieux. »

L’accent est marqué sur le développement local et sur certaines de ses composantes comme l’agriculture, l’élevage, le petit commerce, etc. Mais il n’y a pas que cela. Il y a aussi l’accès à l’électricité, à l’eau potable, à une gestion rurale plus intégrée, à la santé, à l’éducation.

« Si nous avons la chance d’avoir des élites qui sont conscientes de cette situation et qui ouvrent des perspectives de collaboration avec les jeunes, moi je pense qu’il peut y avoir un espoir autre que de partir, pour la jeunesse africaine. »

Mais il est vrai aussi que la jeunesse jette un regard inquiet sur leurs gouvernants ainsi que sur la société politique. Même s’ils gardent en eux le désir de contribuer au développement de leur pays, ils restent méfiants et hésitent à y participer.

Ailleurs, Moussa Mara dira aussi :

« Il faut donc faire de l’entrepreneuriat une des destinations privilégiées des jeunes Africains …

Il faut réorienter notre système d’enseignement pour que les enfants africains soient plus ouverts à la création d’entreprises, à être autonomes, prendre des risques, faire des démarches dans ce sens…

Il faut aussi créer les conditions pour que ces jeunes bénéficient d’accompagnement, aussi bien localement que sur le plan national quand ils envisagent de se lancer dans l’aventure, depuis l’étape des idées et projets jusqu’à la gestion des activités, voire en cas de difficultés. »

La grande nécessité est de développer une stratégie de développement, qui rassemble tous les acteurs du terrain et qui soit mise au service de projets d’intérêt général tout en cherchant à résoudre des problématiques sociétales.

Certains pays voisins, comme le Burkina Faso, ou le Sénégal, y répondent par la mise en place de structures d’incubation dédiées aux créateurs d’entreprises.

Je pense personnellement qu’une réponse globale est plus adéquate.

Une réponse qui prenne en compte à la fois le vivier des besoins et le vivier des compétences. Une réponse qui n’oublie pas toutes les richesses du secteur informel. Il faut pouvoir le reconnaître et le sortir de son état d’isolement « juridique et administratif ».

Il faut mettre en place des incubateurs de développement qui rassembleraient des diplômés et des acteurs des collectivités locales ou régionales (communautés rurales, association de femmes, membres du secteur informel, etc.)

Ces structures particulières devraient permettre d’aménager un terrain de création collective où tous les acteurs peuvent entrer dans une logique réactive d’échange et d’action dans un grand projet collectif et multiforme où le dialogue doit être l’outil indispensable de révélation des idées

Il y a plusieurs groupes à prendre en considération.

Celui des communautés rurales et urbaines, celui du secteur informel, celui des diplômés, celui des maliens de l’extérieur, les associations de femmes et encore d’autres qui appartiennent tant à la société civile qu’à la société politique.

Le but étant de créer des synergies entre ces groupes sur des préoccupations communes.

Il faut accompagner les jeunes diplômés dans la mise en œuvre d’un projet professionnel mais en même temps les engager à appréhender les réalités du terrain.

Il faut éveiller les membres des communautés locales à adopter une approche qui leur permette de faire un diagnostic personnel de leurs besoins qui regroupe dans une même enveloppe :

  • La mise en valeur des activités de terrain génératrices de revenus et de valeur ajoutée propres à bien assurer les services nécessaires à la communauté, ainsi que
  • Des pistes propres à faire émerger des métiers que pourront notamment exercer des jeunes, qui ne trouvent plus ni leur place, ni d’avenir dans ce microcosme et vont grossir les populations des grandes villes, sans trouver réponse à leur question existentielle. Aves tous les risques que ce phénomène de fuite migratoire entraine.

Il est très important d’associer ces deux aspects. Il est crucial de pouvoir redonner un horizon de vie dans les campagnes et réinventer ainsi un autre développement.

Il faut enfin créer des ponts entre toutes ces zones d’incubation pour mieux les rapprocher et mieux les associer et surtout leur permettre de définir clairement les objectifs à atteindre pour pouvoir en suivre les étapes de progression.

Il faut donner à chaque individu les moyens de situer sa progression et d’optimiser ses compétences.

2 commentaires sur « Il faut cesser d’être étranger dans son propre pays (Moussa Mara) »

  1. L agriculture péri urbaine et le secteur informel dans les villes sont des sources d’ activités génératrices de revenus immenses. Organiser la formation et l’accompagnement des jeunes pour leur permettre de développer ou de structurer leur activité afin qu’ils puissent mieux en vivre est un absolue nécessité pour les pays d’Afrique où chaque année des millions de jeunes arrivent sur le marché du travail, avec ou sans diplôme mais avec beaucoup d’envie de travailler, mais sans aucune chance de trouver un emploi perrin dans une entreprise locale.
    Des actions sont en cours dans plusieurs pays au niveau national qui vont dans ce sens.
    Il s’agit de leur donner de l’ampleur et de les généraliser sans oublier de prévoir les financements nécessaires au lancement ou développement des mini entreprises qui seront créées .
    J ai participé à la un de ces projets, nous pouvons échanger sur le sujet.
    André Muller, AGIR abcd Roussillon

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