Nous sommes revenus de Bamako.

Le coeur est un peu lourd et triste comme cette maladie dont le pays ne parvient pas à se défaire. Retrouver l’espérance, revivre le Maliba de sa jeunesse, tuer ce rétiaire invisible qui paralyse ses élans réels dans les mailles d’un filet pernicieux.

La société ne devrait pas s’accrocher au pouvoir mais faire participer au pouvoir.

Pour répondre à une question posée, l’initiative des « boursiers de l’excellence » qui a vu le jour en 2000, sous l’impulsion du Président malien Alpha Konaré, est toujours d’actualité.

Chaque année, une quinzaine de jeunes maliens, issus d’une sélection très rigoureuse après le baccalauréat se rendent tous les ans en France, avec l’appui de la coopération, pour poursuivre des formations de pointe dans divers domaines tels que les télécommunications, l’informatique, l’économie, les finances.

Leur taux de réussite est de l’ordre de 95 %. Si au départ, il y avait une obligation de l’Etat malien de leur fournir un emploi, on a du constater que très peu revenait au pays.
A ce jour, on peut estimer que, toutes promotions confondues 31 ont trouvé un emploi au Mali, et 200, diplômés ou en cours d’étude, se trouvent en France.

A partir de 2007, ils se sont constitués en Cellules pour le Développement du Mali (CPD). En cela, ils assumaient pleinement leur volonté de contribuer à l’avenir de leur pays, mais voulaient assumer leur indépendance de réflexion et d’action tout en se libérant d’engagements officiels difficiles à tenir.

L’exemple du CPD n’est pas unique. On rencontre parmi beaucoup de ceux qui veulent faire des études, avec ou sans les facilités d’une bourse, cette soif de participer à un développement communautaire. On les trouve dans toute la diaspora, dans des associations comme l’ADEM.

On les trouve, cultivant une ambiguïté difficile à lever. Le diplôme n’est pas une fin en soi. L’obtenir, c’est démontrer une infime partie de ses capacités. Mais il y a un au-delà à la qualification officielle qui sans être travaillée conduit au néant.

Pour parodier Simon Leys, « l’enseignement supérieur est un lieu où une chance est donnée à des hommes et des femmes de découvrir ce qui ils sont vraiment. Ce n’est pas une usine à fabriquer des diplômés sans réflexion et sans vision sur l’avenir » (cfr Studio de l’Inutilité – Flammarion 2012).

Cet au-delà, s’appelle le changement, que beaucoup appréhendent avec difficulté, avec angoisse.

Gérer l’incertitude est plus dynamique que se maintenir dans la certitude.
Il faut donc pouvoir proposer à ces jeunes diplômés ou non, mais soucieux de participer à une dynamique constructive, de vaincre leurs angoisses existentielles et les transformer en projets socialement et économiquement utiles et viables.

Il faut pouvoir les aider à reconnaître leur potentiel et surtout admettre que ce potentiel n’est pas figé dans un titre académique.

Ils doivent lever les zones d’incertitude et les utiliser pour gérer leur mission de participation au développement.

C’est une première étape. Apprendre à dompter ses incertitudes pour entrer dans une logique communautaire d’évolution et de progrès.
Ce n’est pas entrer dans une mécanique entrepreneuriale et solitaire. C’est avant tout entrer dans une réflexion solidaire de projet et y trouver socialement sa place.

Il faut donc avant tout faire l’état des lieux de son environnement social et personnel, pour modeler un plan d’action et des stratégies.

2 commentaires sur « Dompter l’incertitude »

  1. Toujours très bien analysé et bien écrit -37 sur 200 c’est peu – le jeune malien que j’accompagne depuis 4 ans – doctorant à Lyon actuellement, va suivre une formation dans les métiers de l’humanitaire mais a toujours affirmé vouloir retourné dans son pays
    Bonne chance à vous – Cordialement

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  2. Moi je suggère à ces jeunes maliens de sortir de l’esprit providence de revenir au pays avec des projets fiables et de se battre pour obtenir les financements.
    Oui se battre parce que c’est un combat en Afrique.

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